Pour que la cause des personnes disparues au Liban ne tombe pas dans l'oubli, l'ONG Act for the Disappeared a lancé le projet « Fus'hat amal » *. Dans ce cadre, nous publions une série de témoignages fictifs qu'auraient apportés des Libanais arrachés à leur milieu familial et social.
 

Mon prénom est Abed. J'étais un homme de 36 ans très actif et ambitieux.
Après avoir étudié la médecine à l'Université du Caire, je suis rentré au Liban pour travailler dans un laboratoire médical. À la fin de la journée, j'avais l'habitude de retrouver mes amis à Raouché, au café Mary Land, qui a aujourd'hui laissé la place au Movenpick.


J'allais souvent à Tripoli où j'avais ouvert une concession automobile. À chacun de mes déplacements, je m'arrêtais chez ma mère pour lui ramener les confiseries qu'elle aimait tant.


Tous mes proches se souviennent que j'étais un passionné du Liban. J'avais eu la chance de beaucoup voyager, mais j'étais toujours impatient de rentrer à la maison. Je ne manquais jamais une occasion de visiter de nouveaux endroits avec mon frère Talal. Il m'accompagnait dans toutes mes aventures.


L'une de celles qui me tenaient le plus à cœur restait un projet d'enseignement pour améliorer l'éducation des jeunes au Liban. Mon projet visait à créer un collège professionnel où les étudiants pourraient être mieux préparés à entrer dans le monde du travail. J'avais beaucoup d'ambitions pour mon pays et beaucoup d'énergie à investir.


Mais tout s'est arrêté en ce funeste jour de septembre 1982, quand j'ai disparu entre Beyrouth et Tripoli.
Mes parents ont vieilli, tourmentés par l'incertitude quant à mon sort. Ils sont tous les deux morts avant d'avoir eu des réponses.


Mon nom est Abed el-Raouf. Il semble que ce pays que j'ai tant aimé m'a aujourd'hui abandonné.
Ne laissez pas mon histoire s'interrompre ici.


* « Fus'hat amal » est une plateforme numérique qui rassemble les histoires des personnes disparues au Liban. Le projet est financé par le Comité international de la Croix-Rouge, l'Union européenne, le National Endowment for Democracy et la Fondation Robert Bosch.


Des histoires d'autres personnes ayant disparu durant la guerre sont disponibles sur le site Web de Fus'hat amal à l'adresse : www.fushatamal.org
Si vous êtes un proche d'une personne disparue, vous pouvez partager son histoire sur le site du projet ou contacter Act for the Disappeared aux 01/443104, 76/933306.

 


Source & Link: L'Orient le Jour